La troisième guerre mondiale est déjà
commencée.
Roger AKL*
01.02.2012
Introduction : Questions et
contradictions.
L’extrémisme musulman et Al Qaeda
sont-ils les ennemis de l’Occident ? Qui a créé Al Qaeda?
Comment se fait-il que l’Arabie saoudite principale alliée
musulmane de l’Occident ait financé Al Qaeda, les Taliban et
toutes les madrasas et mosquées extrémistes dans les mondes arabe,
musulman, asiatique, africain et occidental ? Comment se fait-il
qu’Al Qaeda soit ennemie des Etats-Unis et de l’Iran, ennemi des
Etats-Unis, l’ennemi de mes ennemis ne serait-il plus mon ami ?
Comment se fait-il que c’est à la
Turquie islamo-fasciste, qui a complètement éliminé ses chrétiens,
par génocides, massacres et oppressions, qui a nié avoir jamais
commis des génocides dans ses anciennes colonies, qui n’a
jamais appliqué les droits de l’homme chez elle, comment se
fait-il qu’on lui confie le soin de défendre les droits de l’homme
dans les pays avoisinants ? Comment se fait-il que l’on confie la
même mission aux Etats les plus dictatoriaux, théocratiques et
extrémistes musulmans du monde arabe, je nomme l’Arabie
saoudite, le Qatar et autres émirats du Golfe ?
Comment se fait-il que l’Occident ait
fait massacrer des dizaines de milliers de civils en Libye pour
remplacer le dictateur Libyen par des islamistes intégristes qui ont
fait partie d’Al Qaeda et autres sectes islamiques intégristes,
supposées être ennemies de ce même Occident ? Comment se fait-il
que l’Occident soi-disant ennemi des extrémistes musulmans veut-il
renverser le gouvernement laïc syrien pour le remplacer par ces
mêmes intégristes ? Si les extrémistes islamiques sunnites sont
les alliés de l’Occident dans les pays arabes, pourquoi cette
campagne internet, contre l’Islam européen et tout islam, confondu
avec ces mêmes intégristes ? Quelles sont les relations de
l’occident avec les nouveaux gouvernements islamistes intégristes
de Libye, d’Egypte et de Tunisie, arrives au pouvoir grâce, entre
autres, à l’appui et aux finances des amis saoudiens et du Qatar ?
Nous allons donc, dans un premier
temps, faire un petit historique pour ensuite essayer d’en déduire
ce qu’on nous prépare dans l’avenir.
1 – Le déclencheur Liban.
En 1974, au moment où mon pays était
une sorte de paradis terrestre et que la guerre civile battait son
plein à Chypre, en préparation de l’occupation turque, les juifs,
citoyens libanais, à part entière, commencèrent à vendre leurs
biens pour quitter le pays en toute hâte. Un ami arménien américain
nous faisait alors cette prophétie :
« Bientôt ce sera le tour du Liban, à
cause de ses 18 confessions, car ne pouvant pas battre l’Union
soviétique de l’extérieur, à cause de l’équilibre de la
terreur, il fallait la faire imploser de l’intérieur sous l’effet
des guerres de religions sur ses républiques musulmanes ».
En 1975, je fus envoyé comme Assistant
de l’Attaché Libanais des Forces Armées à Washington DC, aux
Etats-Unis, que je croyais être nos alliés contre les Palestiniens
révoltés ; je fus étonné de voir que ce pays ami était l’allié
de tous les belligérants libanais ou palestiniens, quelles que
soient leurs religions ou confessions. Ils fournissaient les armes à
qui pouvaient les payer, mais pas à l’armée libanaise dont
la mission était de séparer les belligérants. Le Liban était
l’appât.
Une des conséquences de ces guerres
libanaises fut le renversement du Shah d’Iran, car un bataillon
iranien faisait partie des casques bleus à la frontière avec Israël
et ses soldats étaient témoins des souffrances de la population
chiite de la région par les mains des alliés israéliens de leur
shah. Conséquence voulue par les Américains ? C’est ce dont le
Shah a accusé ses anciens bienfaiteurs dans ses mémoires. La suite
montrera que cela était consistant avec la stratégie américaine
d’excitation des fanatismes religieux.
· Entretemps, le Liban fut
divisé en zones d’occupations par ses voisins syrien et israélien
avec bénédiction américaine. Puis ce fut le débarquement des
troupes multinationales supposées y ramener l’autorité de
l’Etat, mais étonnamment le cuirassé New Jersey tirait sur les
révoltés des obus inertes, tandis que les avions français tuaient
deux chèvres « séditieuses » (islamistes ?) dans une ferme de la
Bekaa (1982-83). Finalement après moult pérégrinations et
souffrances du peuple libanais, la constitution de ce pays fut
amendée pour donner tous pouvoirs au Premier Ministre sunnite qui
devait être un sujet du roi très islamique saoudien, un homme
d’affaires féru en moyens pour mettre en faillite l’Etat
libanais et l’endetter de plus de soixante milliards de dollars,
méthode américaine nouvelle pour faire obéir les pays
récalcitrants. Son assassinat permit de mettre le malheureux Liban
sous tutelle des Nations Unies et assujetti aux foudres et juges d’un
tribunal international spécial et injuste dont il doit toujours
payer la moitié des dépenses. Cela ne suffit pas. Cet homme fut
transformé en martyr sunnite pour rendre sacrilège toute critique
de sa gestion des finances de l’Etat et provoquer un fanatisme
sunnite préparatoire à une guerre confessionnelle entre les deux
parties sunnite et chiite de la population. Bien sûr, son fils était
chargé de le remplacer, par l’Occident et le roi théocratique
saoudien mais « bon islamiste », car ami de l’Occident, pas comme
Al Qaeda qu’il avait aidé à créer par ses finances et les
combattants islamiques saoudiens et autres arabes.
2 - L’Afghanistan, l’Iran, l’Iraq
et Al Qaeda.
Revenons un peu en arrière, car les
guerres du Liban, ayant excité les passions religieuses furent
utilisées pour créer une révolte islamique sunnite en
Afghanistan, mais aussi pour renverser le Shah par une révolte
islamique chiite dont le Shah accusa les Américains d’en être les
promoteurs. Il y a un fait que Khomeiny revint à Téhéran sur un
avion d’Air France, tandis que le Shah était traité en brebis
galeuse par tous les pays occidentaux, ses anciens amis et alliés.
Bien sûr cet Etat chiite ne pouvait
qu’être ennemi de l’Occident puisqu’ennemi d’Al Qaeda
sunnite ; il battit les troupes américaines envoyées pour sauver
leurs diplomates en utilisant le « miracle » du même « vent
divin » que les Britanniques utilisèrent contre la Grande Armada,
quelques siècles plus tôt. Etonnant comment l’Histoire se répète.
On dirait que Dieu n’a pas beaucoup d’imagination.
Ce fut l’occasion de lancer l’Iraq
arabe dirigé par un ancien homme de main sunnite de la CIA, Saddam
Hussein, contre l’Iran chiite, ramenant le Moyen-Orient à ses
haines entre Perses et Arabes, sunnites et chiites. La minorité
chrétienne n’avait plus d’importance, sauf pour exciter par ses
malheurs la rue occidentale, qui ne se rappelle de son
christianisme, que par ses inimitiés ataviques avec un vieil islam
conquérant puis colonisé.
Non seulement le Moyen-Orient fut
divisé en confessions et races rivales, mais ce fut aussi le cas de
la Méditerranée, alors que les communications ne pouvaient que
faire du monde un grand Liban où tous les pays ne pouvaient plus
qu’être, comme mon petit pays, des mosaïques d’ethnies et de
religions.
La mission du Liban était donc
d’apporter au monde la manière de pouvoir vivre en paix et en
communion entre ces différentes communautés et ce fut ce que
Jean-Paul II a expliqué aux Libanais et au monde.
Serait-ce aussi pour cela que ce petit
pays ne pouvait pas être laissé en paix, car son existence même
contrecarrait les plans de la seule superpuissance mondiale qui
s’était lancée dans la conquête de la planète ?
3 – Contradictions américaines.
Elles sautent aux yeux dans toute la
politique américaine et même occidentale :
Les Américains ont eux-mêmes créé
Al Qaeda et armé les Taliban, pourtant ils furent en guerre contre
eux (le 11 septembre même est discuté, de même que la mort de Ben
Laden pose plus de questions qu’elle n’en résout) et,
aujourd’hui, ils semblent s’entendre avec les Islamistes un peu
partout dans les pays arabes et discutent déjà de paix avec ceux
d’Afghanistan. Leurs alliés sont les théocraties du Golfe, ils
s’entendent très bien avec les Islamistes et Al Qaeda au Maghreb
Islamique (AQMI) qu’ils ont installé en Libye, les partis
islamiques qui gouvernent en Tunisie, au Maroc, en Egypte, en Turquie
et même en Jordanie sont leurs alliés, tandis que les Turcs, l’Emir
du Qatar, l’Arabie saoudite, les Haririens pro-Saoudiens du Liban
et les combattants islamiques libyens sont tous alliés avec la
France et les Etats-Unis, pour renverser le gouvernement laïc
syrien. Les Chrétiens du Liban et tous les Libanais ont été
abasourdis par le genre de réception que le Patriarche libanais
a reçue en France, amie millénaire du Liban (notre tendre mère,
disent les Maronites) et dont le résultat a été que le patriarche
ne fut pas reçu par les dirigeants américains lors de sa visite aux
Etats-Unis. Son péché mortel a été d’attirer leur attention que
les remplaçants du gouvernement syrien pouvaient être des
séditieux islamiques fanatiques, qui mettraient en danger la vie,
les libertés et les droits de l’homme non seulement en Syrie mais
au Liban : en un mot, le remède pouvait être pire que le mal.
Le Patriarche a sûrement dû donner
les exemples de la Libye (qui a envoyé ses combattants islamiques
en Turquie pour y aider ce qu’on appelle le Conseil National
Syrien) et de tous ces pays où les islamistes ont pris le pouvoir ;
il a sûrement dû montrer combien les peuples de Syrie et du Liban
craignent un retour de la Turquie, plusieurs fois génocidaire. Mais
cela n’intéresse pas les Américains, car ils ont une
politique « planétaire » et ne s’abaissent pas aux « détails »
que sont les petits pays comme le Liban et la Syrie !
4 - La politique planétaire des
Etats-Unis.
Quelles seraient les raisons de ce
chaos incompréhensible au Moyen-Orient ? Pourquoi ces comportements
incompréhensibles des acteurs du drame, notamment ceux des
Etats-Unis d’Amérique, créateurs, financiers, promoteurs de
l’extrémisme islamique, avec leurs coéquipiers et collaborateurs
obéissants que sont les Saoudiens, les Pakistanais, les Turcs et que
deviennent aujourd’hui les extrémistes musulmans de tous les pays
arabes du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord ?
On a beaucoup répété que les
Etats-Unis sont manipulés par leurs corporations et leurs lobbies,
le fameux complexe militaro-industriel qui aurait intérêt à ce que
les guerres l’enrichissent par les ventes d’armes et de matériaux
ainsi que les reconstructions des infrastructures détruites. On a
aussi parlé du fait que Saddam Hussein avait fait le sacrilège de
vouloir vendre son pétrole en euros et que l’Iran veut le vendre
en d’autres monnaies que le dollar. On a aussi dit que l’Amérique
voudrait faire passer par la Turquie le gaz et le pétrole acheté
par l’Europe pour la détacher de la Russie. On a même cité Henri
Kissinger sur internet disant que l’Amérique était en train de
pousser la Russie et la Chine à l’attaquer pour qu’elle puisse
les détruire et devenir ainsi le maître final de la planète. On a
enfin dit que les Etats-Unis ont appris la leçon de leurs ancêtres
britanniques qui cherchaient toujours à avoir continuellement
des guerres sur le continent européen pour qu’aucune puissance ne
puisse lui faire risquer de perdre sa maîtrise des mers. Les
Américains feraient de même avec le continent eurasiatique pour
garder, eux, leur statut de seule superpuissance mondiale, statut que
la situation économique et financière mondiale, ainsi que leurs
dépenses guerrières risquent de leur faire perdre.
Je retiendrai cette dernière
possibilité. Seulement, je ne comprends pas le suivisme européen
car l’Europe, fait partie du continent eurasiatique voue aux
guerres intestines.
Malheureusement pour le monde, y
compris l’Amérique, certaines des gaffes US risquent de mettre le
feu à la planète.
5 - La troisième guerre mondiale.
Quoi de mieux, pour créer des guerres
continuelles, que les guerres de religions ? Les Etats-Unis sont
passés maîtres dans le lavage de cerveau de masse. Ils contrôlent
les médias chez eux et en Europe, tandis que leurs protégés
des théocraties du Golfe contrôlent ceux du monde arabe avec quand
même un peu plus d’exceptions, car les populations arabes se
méfient de leurs dirigeants, surtout quand il s’allient avec les
alliés d’Israël, qu’ils considèrent comme un agresseur et
l’occupant d’une de leurs terres les plus sacrées ; c’est pour
cela que l’on voit le Hamas, parti islamiste sunnite, allié avec
le Hezbollah et l’Iran chiites, ainsi qu’avec le gouvernement
laïc de Syrie.
C’est pour cela qu’en France, par
exemple, on ne parle que du danger islamique, des massacres des
chrétiens dans les pays musulmans ; les photos des massacres au
Nigeria sont diffusées incessamment sur internet, tandis que
dans les pays arabes sunnites on ne parle que du danger chiite,
surtout iranien, et de la bombe nucléaire chiite perse. Les médias
arabes en ont presque oublié la question palestinienne et Israël.
Pourtant, personne ne parle que le
gouvernement Bush en s’attaquant à l’Iraq et en détruisant le
plus grand ennemi arabe de l’Iran a agi en meilleur bienfaiteur de
ce dernier pays. Les Américains seraient-ils si idiots ?
De même, quand les Américains et les
Européens ont fait l’embargo sur le pétrole iranien et sur la
banque centrale de ce pays, ne savaient-ils pas qu’ils étaient en
train de pousser l’Iran à les attaquer et à attaquer les pays
arabes du Golfe, comme Roosevelt est dit avoir poussé le Japon à
attaquer à Pearl Harbour ? Quant à la Chine, accepterait-elle
vraiment de renoncer au pétrole iranien pour se rendre tributaire
des alliés saoudiens des Américains ? Est-ce que vraiment les
Américains pensent que les Iraniens et les Russes laisseraient les
Turcs et les principautés islamiques du Golfe renverser le
gouvernement syrien et couper l’Iran de la Méditerranée ?
L’Europe et Israël ont-ils vraiment intérêt à voir la
Turquie sur le Golan, prête à reprendre son chemin vers son ancien
empire de l’Est et du Sud de la Méditerranée ? Car, la Turquie
voudra-t-elle se laisser stopper par la seule pierre d’achoppement
restante qu’est Israël ?
Quant aux Russes, laisseront-ils leur
ancien voisin ennemi reprendre pied en Syrie et en Iraq et profiter
du pétrole des pays du Golfe ou il remplacera rapidement les
Américains ? Et l’Iran dans tout cela ? Laissera-t-il la Turquie
reprendre les territoires dont elle l’avait chassé en 1515 ?
On voit ici que les Américains ont
fait toutes les ”gaffes” possibles pour prévenir Russes, Chinois
et Iraniens et les pousser à défendre la Syrie.
Les Russes, eux, furent encore plus
terrorises par les actions ”agressives” US en Géorgie, puis les
mensonges sur la Libye, puis l’installation de leurs défenses
anti-missiles en Turquie, ennemie de la Russie dans le Caucase et
danger dans les républiques musulmanes turcophones de Russie et
enfin, « cerise sur le gâteau » leur appui aux manifestations
anti-Poutine, comme si la Russie faisait partie du Printemps Arabe.
La Russie a alors compris, si elle ne l’avait pas fait déjà,
qu’après la Syrie ce serait son tour, peut-être en troisième
position après la destruction de l’Iran. La plus grosse gaffe
américaine fut qu’ils excitèrent trop d’ennemis en même temps.
C’est pour cela que la Russie posera
son veto sur tout ce qui peut nuire à son allié, Assad, aux
Nations-Unies, car il s’agit de sa propre survie.
C’est pour cela que la bataille en
Syrie sera très dure et que nous pouvons dire que c’est les
premiers combats d’avant-garde qui préparent à la troisième
guerre mondiale et les ”alliés européens” des Etats-Unis
feraient bien de se désengager. D’ailleurs, pour la France, la
Russie est un allié séculaire qu’elle ferait bien de
retrouver, car l’Amérique, elle, a une politique planétaire qui
se fiche des « détails surtout alliés ».
Elle ferait bien de répéter après le
cardinal Tauran : « Il est important que, dans un monde pluriel et
précaire comme le nôtre, nos concitoyens puissent constater que le
dialogue inter religieux est une richesse pour les sociétés humaines
: des croyants qui, dans le respect de leurs différences, sont
capables de s'écouter, d'apprécier ce qu'il y a de bien et de
beau chez l'autre sont des prophètes de l'espérance… Ils
disent qu'il est possible de vivre ensemble parce que la personne
humaine est beaucoup plus que ce qu'elle montre ou produit ! »
* auteur de "CRI des chrétiens d'Orient", Ed. Sigest, 2me édition 2011 (sous pseudonyme Jérémie Jonas)