Boston,
Mass. (A.W.) Des experts du génocide, inquiets, on écrit une lettre
ouverte, relevant des “ inexactitudes historiques et conceptuelles “
dans la décision de la Cour Européenne dans l’affaire Dogu Perincek c/
Suisse, et appellent le gouvernement de Suisse à demander un réexamen du
jugement de la Cour.
Le texte de la lettre , dans son intégralité, publié le 14 février, est repris ci-après.
Lettre ouverte à :
Madame
la Conseillère Fédérale Simonetta Sommaruga, Cheffe du département
fédéral de justice et police (DF JP) Palais fédéral ouest - CH-3003
Berne
Ayant
pris connaissance de la décision de la Cour dans l’affaire Dogu
Perincek c/ Suisse (ECHR 370,230,27 décembre 2013), nous, concernés en
tant qu’experts du génocide, pensons qu’il est impératif de répondre à
des inexactitudes historiques et conceptuelles qui sont contenues dans
la décision, et nous pensons que ces inexactitudes ont une grave
signification éthique et sociale.
Nous
ne remettons nullement en question la notion de liberté d’expression,
chose que les experts admettent la plupart du temps comme faisant partie
d’une société ouverte et démocratique. Nous sommes malgré tout
interpellés par des éléments du raisonnement de la Cour qui sont en
contradiction avec les faits, s’agissant des données historiques sur le
Génocide arménien de 1915, et en contradiction avec une évaluation
éthique du négationnisme.
La
décision affirme que 1) “ génocide est une notion de droit très étroite
dont la preuve est difficile à apporter “ ; 2) la Cour doutait qu’il
puisse y avoir un consensus général sur des événements tels que ceux en
cause ici, étant donné que la recherche historique est par définition
controversée et discutable ou ne se prête guère à des conclusions
définitives ou à des vérités objectives et absolues ; la cour emploie
l’expression “ débat enflammé “ en se référant au contexte politique
actuel entourant le Génocide arménien.
Premièrement,
c’est une conclusion absolue des experts qui étudient le génocide (des
centaines d’universitaires indépendants, qui n’ont aucune affiliation
avec des gouvernements, et les travaux qui se sont déroulés sur des
décennies sont le fait de nombreux pays et nationalités ) : le massacre
massif d’Arméniens par les Ottomans est conforme à tous les aspects de
la définition donnée à l’article 2 de la Convention des Nations Unies
pour la Prévention et la Répression du Crime de Génocide.
En
1997, l’Association Internationale des Experts du le Génocide, (IAGS)
le corps le plus important de experts qui étudient le génocide, a voté
une résolution reconnaissant unanimement les massacres ottoman comme un
génocide. Le Centre International pour la Justice Transitionnelle (ICTJ)
avait préparé une analyse pour la Commission de Réconciliation
arméno-turque (TARC) en 2003, selon laquelle “ les Événements [de 1915]
comportent tous les éléments du crime de génocide tel qu’il est défini
dans la convention (UNCPPCG) “.
En
2000, 100 experts de l’Holocauste de premier ordre ont signé une
pétition dans le New York Times affirmant que les événements de 1915
étaient un génocide et plaidant pour une reconnaissance mondiale. Une
lettre ouverte de l’IAGS au Premier ministre turc Erdogan, en Juin 2005,
enjoignait au gouvernement turc d’avouer “ le fait historique sans
équivoque du Génocide arménien “. Les trois seuls génocides du 20ème
siècle sur lesquels les théoriciens des études du génocide (tel William
Schabas) sont d’accords, sont les cas des Arméniens en Turquie, en 1915,
des Juifs en Europe, en 1940-45, et des Tutsis au Rwanda, en 1994. La
destruction des Arméniens était au centre de la création par Raphaël
Lemkin du concept de génocide comme un crime du droit international, et
ce fut Lemkin qui créa et employa l’expression Génocide Arménien en
1944.
L’idée
avancée par la Cour que les crimes de génocide ne peuvent s’appliquer
qu’aux événements du Rwanda et de Srebrenica, parce qu’ils étaient jugés
par la Cour Internationale de Justice, est incomplète. Les crimes de
génocide ont été évalués comme événements historiques par des experts
pendant maintenant des décennies, et à la fois les crimes commis contre
les Arméniens par les Turcs ottomans en 1915 et ceux commis contre les
Juifs d’Europe par les Nazis dans les années 1940 ont été qualifiés de
génocide par Lemkin. Ainsi que l’ont noté les experts, les crimes de
génocide peuvent être jugés rétroactivement, et William Schabas a relevé
qu’au cours du procès d’Eichmann à Jérusalem, en 1961, le mot génocide a
été employé rétroactivement pour désigner les crimes commis contre les
Juifs.
En
outre, sous l’article 10, “ la Cour a clairement fait une distinction
entre cette présente affaire et d’autres affaires concernant la négation
des crimes de l’Holocauste... dans lesquelles, selon une cour
internationale, les actes mis en cause étaient clairement établis “.
Nous relevons que les responsables de l’Holocauste étaient poursuivis
aux procès de Nuremberg (1945-46), non pour crime de génocide, mais pour
“ crimes contre l’humanité “, même si Raphael Lemkin avait créé
auparavant le mot “ génocide “. Le cas arménien, contrairement à
l’affirmation de la Cour, a bien une base juridique claire pour son
authenticité. D’abord, “ crimes contre l’humanité “ est la formulation
exacte employée par la France, le Royaume Uni et la Russie en 1915, dans
leur déclaration commune répondant aux massacres des Arméniens par le
gouvernement turc ottoman. Après la Première Guerre Mondiale, le
gouvernement ottoman avait constitué des tribunaux militaires
(1919-1920) pour juger 200 membres de haut-rang de l’armée et du
gouvernement pour avoir prémédité le massacre de masse de la population
arménienne. La décision de 2006 du Centre International pour la Justice
Transitionnelle affirme elle aussi une telle base légale.
La
Cour a également décidé, sur la base de l’article 17 (interdiction de
l’abus de droit) , que “ Le rejet de la caractérisation juridique en “
génocide “ des événements de 1915 n’était pas en lui-même une incitation
à la haine contre le peuple arménien “. Et pourtant, la Cour Européenne
des Droits de l’Homme déclare (au paragraphe 19) que “ la négation de
l’Holocauste est le principal moteur de l’antisémitisme “. Nous
relèverons de façon similaire que la négation du Génocide arménien en
Turquie a eu pour résultat l’assassinat du journaliste arménien de
Turquie Hrant Dink, et a eu pour résultat des violences sur d’autres en
Turquie.
En
se référant au Génocide arménien comme à un “ mensonge international “,
M. Perincek révèle un niveau d’extrémisme qui submerge tout sens du
jugement. Nous pensons que la Cour fait un faux-pas quand elle
privilégie le négationnisme de la Turquie (un pays dont le bilan sur la
liberté des intellectuels et sur les droits de l’homme au cours des
décennies passées est parmi les pires) en évoquant un “ débat enflammé
“. Comme l’a écrit l’IAGS dans une lettre ouverte sur le négationnisme
et le Génocide arménien (octobre 2006), “ les experts qui nient les
faits du génocide malgré les preuves irréfutables ne sont pas engagés
dans un débat historique ; leur programme est tout autre. Dans le cas du
Génocide arménien, le programme est d’absoudre la Turquie de sa
responsabilité dans la planification de l’extermination des Arméniens. -
un programme constant, quel que soit le parti au pouvoir, depuis
l’époque du génocide, en 1915. Les experts qui contestent que ce qu’ont
subi les Arméniens en 1915 dans l’Empire ottoman est un génocide,
ignorent effrontément les preuves irréfutables historiques et
universitaires “.
Comme
l’experte du génocide Deborah Lipstadt l’a écrit : La négation du
génocide, celui des Turcs contre les Arméniens, ou celui des Nazis
contre les Juifs, n’est pas le fait d’une réinterprétation
historique...Les négationnistes visent à convaincre les tiers qu’une
autre face de l’histoire existe...alors qu’il n’y a pas d’autre face “.
Nous pensons que la décision et le raisonnement de la Cour contribue au
négationnisme et que cela a un effet corrosif sur les efforts de vérité
et de réconciliation, et sur l’éthique.
Nous pensons qu’il est important que le gouvernement de Suisse demande un réexamen du jugement de la Cour dans cette affaire.
Salutations,
Taner Akçam, Professeur, Centre d’Études de l’Holocauste et du Génocide Kaloosdian Mugar
Margaret Lavinia Anderson ; Actuel Professeur de l’Université de California -Berkeley, Professeur Émérite d’Histoire
Joyce
Apsel, Maître de Conférence à l’Université de New York ; ancien
président de l’Association Internationale des Chercheurs sur le Génocide
Yair Auron, chef du Département de Sociologie, Sciences Politiques et Communication, University Libre d’Israel
Peter Balakian, Donald M. and Constance H. Rebar Professeur en Humanités, Colgate University
Annette
Becker, Professeur d’Histoire, Université de Paris- Ouest Nanterre La
Défense ; Membre Senior, Institut Universitaire de France
Matthias Bjornlund, historien aux archves ; Institut Danois pour les Études Étrangères (DIS), Copenhague
Donald Bloxham, Professeur d’Histoire Moderne, Université d’Édinbourg
Hamit Bozarslan, Directeur, EHESS, Paris
Cathy Caruth, Frank H. T. Rhodes Professeur de Lettres Humaines, Cornell University
Frank Chalk, Professeur d’Histoire ; Directeur, Institut d’Études du Génocide et des Droits de l’Homme de Montréal
Israel
Charny, Ancien Président Association Internationale des Chercheurs sur
le Génocide ; Directeur, Institut de l’Holocauste et du Génocide,
Jerusalem
Deborah
Dwork, Rose Professeur d’Histoire ; Directrice du Centre Strassler pour
les études sur l’Holocauste et le Génocide, Clark University
Helen Fein, Chercheuse Indépendante ; Ancienne Directrice Exécutive de l’Institut pour l’Étude du Génocide (New York)
Marcelo
Flores, Professeur d’Histoire Comparative ; directeur, The European
Master in Human Rights and Genocide Studies, Université de Sienne
Donna-Lee
Frieze, Prins Chercheuse Principale, Centre pour l’Histoire Juive, New
York City ; Chercheuse Invitée, Institut de Recherche Alfred Deakin,
Deakin University, Melbourne.
Wolfgang Gust, Chercheur Independent, Directeur armenocide.com.de Hamburg
Herbert Hirsch, Professor de Sciences Politiques, Virginia Commonwealth University ; co-éditeur, Genocide Studies International
Marianne
Hirsch, William Peterfield Trent Professeur d’Anglais et de Littérature
Comparative à l’Institut pour la Recherche sur la Femme, le Genre, et
la Sexualité ; Columbia University
Tessa Hofmann, Prof. h.c. Dr. phil, Frie Universitat Berlin, Institut pour les Études Est Européennes
Richard
Hovanissian, Professeur Émérite, Histoire Arménienne et du
Proche-Orient à l’Université de Californie, Los Angeles ; Distingué
Chercheur Invité à l’Université Chapman et à l’Université de Californie,
Irvine
Raymond Kevorkian, Historien, Université de Paris-VIII-Saint Denis
Hans-Lukas Kieser, Professeur d’Histoire Moderne, Université de Zurich
Mark Levene, Maître de Conférence en Histoire Comparative, Université de Southampton, Royaume-Uni
Robert Jay Lifton, MD ; Professeur Émérite Distingué, L’Université de la Ville de New York
Deborah Lipstadt, Chaire Dorot, Professeur d’Histoire Juive Moderne et Études sur l’Holocauste, Emory University
Wendy Lower, John K. Roth Professeur d’Histoire, Claremont McKenna College
Robert
Melson, Professor Émérite, Purdue University ; Ancien Président,
Association Internationale des Chercheurs sur le Génocide
Donald E. Miller, Professeur de Religion ; Directeur, Center for Religion and Civic Culture, Université de Californie du Sud
A.
Dirk Moses, Professeur d’Histoire Mondiale et Coloniale, Institut de
l’Université Européenne, Florence et Rédacteur en Chef, Journal of
Genocide Research.
James R. Russell, Mashtots Professeur d’études Arméniennes, Université d’Harvard
Roger
W. Smith, Professeur Émerite du Gouvernement, Collège de William et
Mary ; Ancien Président, Association Internationale des Chercheurs sur
le Génocide
Leo Spitzer, K.T. Vernon Professeur Émérite d’Histoire, Collège de Dartmouth
Gregory
Stanton, Professeur Chercheur en Études sur le Génocide et sa
Prévention, Université George Mason ; Ancien Président, Association
Inyternationla des Chercheurs sur le Génocide
Yves Ternon, Historien en génocide moderne, chercheur independant, France
Henry C. Theriault, Professeur de Philosophie, Université d’État Worcester Co-Éditor-en-Chef, Études du Génocide et Prévention
Eric
D. Weitz, Doyen des Humanités et Arts et Professeur d’Histoire, Le
Collège de la Ville de New York, Centre des Hautes Études
Boston, Mass. (A.W.) Des experts du
génocide, inquiets, on écrit une lettre ouverte, relevant des " inexactitudes historiques et conceptuelles " dans la décision de la Cour
Européenne dans l’affaire Dogu Perinçek c/ Suisse, et appellent le
gouvernement de Suisse à demander un réexamen du jugement de la Cour.Le texte de la lettre , dans son intégralité, publié le 14 février, est repris ci-après.
Lettre ouverte à :
Madame la
Conseillère Fédérale
Simonetta Sommaruga
Cheffe du département fédéral
de justice et police
Palais fédéral ouest - CH-3003 Berne
Ayant pris connaissance de la
décision de la Cour dans l’affaire Dogu Perinçek c/ Suisse (ECHR
370,230,27 décembre 2013), nous, concernés en tant qu’experts du
génocide, pensons qu’il est impératif de répondre à des inexactitudes
historiques et conceptuelles qui sont contenues dans la décision, et
nous pensons que ces inexactitudes ont une grave signification éthique
et sociale.
Nous ne remettons nullement en
question la notion de liberté d’expression, chose que les experts
admettent la plupart du temps comme faisant partie d’une société ouverte
et démocratique. Nous sommes malgré tout interpellés par des éléments
du raisonnement de la Cour qui sont en contradiction avec les faits,
s’agissant des données historiques sur le Génocide arménien de 1915, et
en contradiction avec une évaluation éthique du négationnisme.
La
décision affirme que
1) " génocide est une notion de droit très étroite
dont la preuve est difficile à apporter " ;
2) la Cour doutait qu’il
puisse y avoir un consensus général sur des événements tels que ceux en
cause ici, étant donné que la recherche historique est par définition
controversée et discutable ou ne se prête guère à des conclusions
définitives ou à des vérités objectives et absolues ; la cour emploie
l’expression " débat enflammé " en se référant au contexte politique
actuel entourant le Génocide arménien.
Premièrement, c’est une conclusion
absolue des experts qui étudient le génocide (des centaines
d’universitaires indépendants, qui n’ont aucune affiliation avec des
gouvernements, et les travaux qui se sont déroulés sur des décennies
sont le fait de nombreux pays et nationalités ) : le massacre massif
d’Arméniens par les Ottomans est conforme à tous les aspects de la
définition donnée à l’article 2 de la Convention des Nations Unies pour
la Prévention et la Répression du Crime de Génocide.
En 1997, l’Association
Internationale des Experts du le Génocide, (IAGS) le corps le plus
important de experts qui étudient le génocide, a voté une résolution
reconnaissant unanimement les massacres ottoman comme un génocide. Le
Centre International pour la Justice Transitionnelle (ICTJ) avait
préparé une analyse pour la Commission de Réconciliation arméno-turque
(TARC) en 2003, selon laquelle “ les Événements [de 1915] comportent
tous les éléments du crime de génocide tel qu’il est défini dans la
convention (UNCPPCG) “.
En 2000, 100 experts de l’Holocauste
de premier ordre ont signé une pétition dans le New York Times
affirmant que les événements de 1915 étaient un génocide et plaidant
pour une reconnaissance mondiale. Une lettre ouverte de l’IAGS au
Premier ministre turc Erdogan, en Juin 2005, enjoignait au gouvernement
turc d’avouer “ le fait historique sans équivoque du Génocide arménien
“. Les trois seuls génocides du 20ème siècle sur lesquels les
théoriciens des études du génocide (tel William Schabas) sont d’accords,
sont les cas des Arméniens en Turquie, en 1915, des Juifs en Europe, en
1940-45, et des Tutsis au Rwanda, en 1994. La destruction des Arméniens
était au centre de la création par Raphaël Lemkin du concept de
génocide comme un crime du droit international, et ce fut Lemkin qui
créa et employa l’expression Génocide Arménien en 1944.
L’idée avancée par la Cour que les
crimes de génocide ne peuvent s’appliquer qu’aux événements du Rwanda et
de Srebrenica, parce qu’ils étaient jugés par la Cour Internationale de
Justice, est incomplète. Les crimes de génocide ont été évalués comme
événements historiques par des experts pendant maintenant des décennies,
et à la fois les crimes commis contre les Arméniens par les Turcs
ottomans en 1915 et ceux commis contre les Juifs d’Europe par les Nazis
dans les années 1940 ont été qualifiés de génocide par Lemkin. Ainsi que
l’ont noté les experts, les crimes de génocide peuvent être jugés
rétroactivement, et William Schabas a relevé qu’au cours du procès
d’Eichmann à Jérusalem, en 1961, le mot génocide a été employé
rétroactivement pour désigner les crimes commis contre les Juifs.
En outre, sous l’article 10, " la
Cour a clairement fait une distinction entre cette présente affaire et
d’autres affaires concernant la négation des crimes de l’Holocauste...
dans lesquelles, selon une cour internationale, les actes mis en cause
étaient clairement établis". Nous relevons que les responsables de
l’Holocauste étaient poursuivis aux procès de Nuremberg (1945-46), non
pour crime de génocide, mais pour " crimes contre l’humanité ", même si
Raphael Lemkin avait créé auparavant le mot "génocide". Le cas
arménien, contrairement à l’affirmation de la Cour, a bien une base
juridique claire pour son authenticité. D’abord, "crimes contre
l’humanité" est la formulation exacte employée par la France, le
Royaume Uni et la Russie en 1915, dans leur déclaration commune
répondant aux massacres des Arméniens par le gouvernement turc ottoman.
Après la Première Guerre Mondiale, le gouvernement ottoman avait
constitué des tribunaux militaires (1919-1920) pour juger 200 membres de
haut-rang de l’armée et du gouvernement pour avoir prémédité le
massacre de masse de la population arménienne. La décision de 2006 du
Centre International pour la Justice Transitionnelle affirme elle aussi
une telle base légale.
La Cour a également décidé, sur la
base de l’article 17 (interdiction de l’abus de droit) , que " Le rejet
de la caractérisation juridique en "génocide" des événements de 1915
n’était pas en lui-même une incitation à la haine contre le peuple
arménien ". Et pourtant, la Cour Européenne des Droits de l’Homme
déclare (au paragraphe 19) que " la négation de l’Holocauste est le
principal moteur de l’antisémitisme ". Nous relèverons de façon
similaire que la négation du Génocide arménien en Turquie a eu pour
résultat l’assassinat du journaliste arménien de Turquie Hrant Dink, et a
eu pour résultat des violences sur d’autres en Turquie.
En se référant au Génocide arménien
comme à un " mensonge international ", M. Perincek révèle un niveau
d’extrémisme qui submerge tout sens du jugement. Nous pensons que la
Cour fait un faux-pas quand elle privilégie le négationnisme de la
Turquie (un pays dont le bilan sur la liberté des intellectuels et sur
les droits de l’homme au cours des décennies passées est parmi les
pires) en évoquant un " débat enflammé ". Comme l’a écrit l’IAGS dans
une lettre ouverte sur le négationnisme et le Génocide arménien (octobre
2006), " les experts qui nient les faits du génocide malgré les preuves
irréfutables ne sont pas engagés dans un débat historique ; leur
programme est tout autre. Dans le cas du Génocide arménien, le programme
est d’absoudre la Turquie de sa responsabilité dans la planification de
l’extermination des Arméniens. - un programme constant, quel que soit
le parti au pouvoir, depuis l’époque du génocide, en 1915. Les experts
qui contestent que ce qu’ont subi les Arméniens en 1915 dans l’Empire
ottoman est un génocide, ignorent effrontément les preuves irréfutables
historiques et universitaires ".
Comme l’experte du génocide Deborah
Lipstadt l’a écrit : "La négation du génocide, celui des Turcs contre les
Arméniens, ou celui des Nazis contre les Juifs, n’est pas le fait d’une
réinterprétation historique... Les négationnistes visent à convaincre
les tiers qu’une autre face de l’histoire existe... alors qu’il n’y a pas
d’autre face". Nous pensons que la décision et le raisonnement de la
Cour contribue au négationnisme et que cela a un effet corrosif sur les
efforts de vérité et de réconciliation, et sur l’éthique.
Nous pensons qu’il est important que le gouvernement de Suisse demande un réexamen du jugement de la Cour dans cette affaire.
Salutations,
Taner Akçam, Professeur, Centre d’Études de l’Holocauste et du Génocide Kaloosdian Mugar
Margaret Lavinia Anderson ; Actuel Professeur de l’Université de California -Berkeley, Professeur Émérite d’Histoire
Joyce Apsel, Maître de
Conférence à l’Université de New York ; ancien président de
l’Association Internationale des Chercheurs sur le Génocide
Yair Auron, chef du Département de Sociologie, Sciences Politiques et Communication, University Libre d’Israel
Peter Balakian, Donald M. and Constance H. Rebar Professeur en Humanités, Colgate University
Annette Becker, Professeur d’Histoire, Université de Paris- Ouest Nanterre La Défense ; Membre Senior, Institut Universitaire de France
Matthias Bjornlund, historien aux archves ; Institut Danois pour les Études Étrangères (DIS), Copenhague
Donald Bloxham, Professeur d’Histoire Moderne, Université d’Édinbourg
Hamit Bozarslan, Directeur, EHESS, Paris
Cathy Caruth, Frank H. T. Rhodes Professeur de Lettres Humaines, Cornell University
Frank Chalk, Professeur d’Histoire ; Directeur, Institut d’Études du Génocide et des Droits de l’Homme de Montréal
Israel Charny, Ancien
Président Association Internationale des Chercheurs sur le Génocide ;
Directeur, Institut de l’Holocauste et du Génocide, Jerusalem
Deborah Dwork, Rose Professeur d’Histoire ; Directrice du Centre Strassler pour les études sur l’Holocauste et le Génocide, Clark University
Helen Fein, Chercheuse Indépendante ; Ancienne Directrice Exécutive de l’Institut pour l’Étude du Génocide (New York)
Marcelo Flores, Professeur d’Histoire Comparative ; directeur, The European Master in Human Rights and Genocide Studies, Université de Sienne
Donna-Lee Frieze, Prins
Chercheuse Principale, Centre pour l’Histoire Juive, New York City ;
Chercheuse Invitée, Institut de Recherche Alfred Deakin, Deakin
University, Melbourne.
Wolfgang Gust, Chercheur Independent, Directeur armenocide.com.de Hamburg
Herbert Hirsch, Professor de Sciences Politiques, Virginia Commonwealth University ; co-éditeur, Genocide Studies International
Marianne Hirsch,
William Peterfield Trent Professeur d’Anglais et de Littérature
Comparative à l’Institut pour la Recherche sur la Femme, le Genre, et la
Sexualité ; Columbia University
Tessa Hofmann, Prof. h.c. Dr. phil, Frie Universitat Berlin, Institut pour les Études Est Européennes
Richard Hovanissian,
Professeur Émérite, Histoire Arménienne et du Proche-Orient à
l’Université de Californie, Los Angeles ; Distingué Chercheur Invité à
l’Université Chapman et à l’Université de Californie, Irvine
Raymond Kevorkian, Historien, Université de Paris-VIII-Saint Denis
Hans-Lukas Kieser, Professeur d’Histoire Moderne, Université de Zurich
Mark Levene, Maître de Conférence en Histoire Comparative, Université de Southampton, Royaume-Uni
Robert Jay Lifton, MD ; Professeur Émérite Distingué, L’Université de la Ville de New York
Deborah Lipstadt, Chaire Dorot, Professeur d’Histoire Juive Moderne et Études sur l’Holocauste, Emory University
Wendy Lower, John K. Roth Professeur d’Histoire, Claremont McKenna College
Robert Melson, Professor Émérite, Purdue University ; Ancien Président, Association Internationale des Chercheurs sur le Génocide
Donald E. Miller, Professeur de Religion ; Directeur, Center for Religion and Civic Culture, Université de Californie du Sud
A. Dirk Moses,
Professeur d’Histoire Mondiale et Coloniale, Institut de l’Université
Européenne, Florence et Rédacteur en Chef, Journal of Genocide Research.
James R. Russell, Mashtots Professeur d’études Arméniennes, Université d’Harvard
Roger W. Smith,
Professeur Émerite du Gouvernement, Collège de William et Mary ; Ancien
Président, Association Internationale des Chercheurs sur le Génocide
Leo Spitzer, K.T. Vernon Professeur Émérite d’Histoire, Collège de Dartmouth
Gregory Stanton,
Professeur Chercheur en Études sur le Génocide et sa Prévention,
Université George Mason ; Ancien Président, Association Inyternationla
des Chercheurs sur le Génocide
Yves Ternon, Historien en génocide moderne, chercheur independant, France
Henry C. Theriault, Professeur de Philosophie, Université d’État Worcester Co-Éditor-en-Chef, Études du Génocide et Prévention
Eric D. Weitz, Doyen des Humanités et Arts et Professeur d’Histoire, Le Collège de la Ville de New York, Centre des Hautes Études